samedi 12 avril 2008

Evasion à la colonie de Saint-Hilaire

En 1853, est établie dans la commune de Roiffé, la colonie agricole et pénitentiaire de Saint-Hilaire. Cet établissement public, destiné à accueillir des mineurs délinquants, offre une alternative à la prison. Jusqu’à 500 détenus, âgés de douze ans à 21 ans, se côtoient ainsi journellement. Parmi ces « bagnards » reconnaissables à leur tunique bleue et leur béret, se trouve Pierre Magnelli. Natif de Fontainebleau, ce jeune homme de 18 ans n’en est pas à sa première incarcération. Déjà condamné à six reprises par le tribunal de la Seine pour vols, il a déjà passé près d’un an et demi derrière les barreaux. Multirécidiviste, il est condamné en juillet 1890 à intégrer Saint-Hilaire jusqu’à ses 20 ans.

D’un caractère violent, Pierre Magnelli devient rapidement un meneur. Indiscipliné, il accumule les punitions. Châtiments, peines de cachots et de fers régissent son quotidien. Depuis son arrivée à Saint-Hilaire, il n’a qu’une seule idée en tête : s’évader. Après s’être procuré un couteau par l’intermédiaire de son codétenu qui travaille aux cuisines, Magnelli décide de profiter de la promenade dominicale pour s’échapper. Le 3 septembre 1893, il met son projet à exécution. Profitant d’un moment d’inattention de la part des matons, Magnelli s’écarte du groupe et commence à courir à travers champs. L’alerte est immédiatement donnée. Les gardiens Rebeilleau et Niveleau se lancent à sa poursuite. Parvenant à encercler le fugitif, ils le somment de jeter son arme. Malgré les ordres proférés, Magnelli force le passage. « J’aurais la peau de l’un de vous deux », s’écrie-t-il en brandissant son arme. Un corps à corps s’engage alors entre le fuyard et Rebeilleau. Alors que l’affrontement semble tourner en faveur du geôlier, Magnelli dégage son bras et poignarde son adversaire dans le dos. Loin de se contenter de ce premier attentat, Magnelli, avec une brutalité inouïe et le sourire aux lèvres, appuie de toutes ses forces sur la lame. Le calvaire du gardien prend fin avec l’intervention de son collègue qui parvient à maîtriser le forcené.

Inculpé de violences et voies de fait Magnelli est renvoyé devant la cour d’assises de la Vienne le 22 novembre 1893. Au cours du procès, le représentant du ministère public réclame une sentence exemplaire. Il est entendu puisque le pupille est condamné à 10 ans de réclusion et à la relégation. La colonie, surnommée « Saint-Hilaire-la-Mort », à cause des mauvais traitements infligés aux enfants, ne fermera définitivement ses portes qu’en 1970.

Sources : Archives départementales de la Vienne, 2 U 1743
Illustration : Louis Fardeau, 18 ans, né à Cersay (Deux-Sèvres), colon évadé d'une colonie toulousaine dans les années 1910, ADV, 3 Y 85.

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