mardi 8 avril 2008

Idylle tragique

C’est dans la commune du Perreux (département de la Seine), qu’Eugénie Bringard, dactylographe de 16 ans au Crédit Lyonnais, fait la connaissance au début de l’année 1908, de Delphin Collin, 19 ans, ancien élève de l’école des arts et métiers d’Angers. Rapidement, les deux jeunes gens décident de se fiancer.

Pourtant, en septembre, 1’attitude de Delphin change brutalement. Influencé par sa famille peu encline à cette union, il s’engage, loin de la capitale, dans le 125ème régiment de ligne de Poitiers pour effectuer son service militaire. Ne supportant plus l’éloignement et les lettres de moins en moins enflammées de son amant, Eugénie profite de l’absence de ses parents pour prendre le train à destination de Poitiers. Le 14 avril 1909, Delphin, informé par télégramme de sa fugue, l’attend sur le quai de la gare. L’accueil reçu par la jeune fille est loin de répondre à ses espérances. Delphin est distant et ne semble pas vouloir la retenir. Eugénie s’entête, prend une chambre d’hôtel au Plat d’Etain et se met en quête de trouver du travail. Malheureusement, elle n’essuie que des refus. Désespérée, elle achète alors un revolver et des cartouches qu’elle dissimule dans son corsage. A-t-elle l’intention de se suicider ou de tuer son ami ?
Le lendemain, Delphin et Eugénie se retrouvent sur la place d’Armes et se rendent ensemble jusqu’à la caserne. Arrivé rue Sainte-Catherine, Delphin explique qu’il souhaite rompre définitivement. Le militaire se penche alors vers Eugénie pour l’embrasser une dernière fois. Celle-ci sort son arme et fait feu avant de s’évanouir. Delphin, gravement blessé à la poitrine, se précipite vers la caserne où plusieurs compagnons, alertés par la détonation, s’affèrent autour de lui. Il succombera deux jours plus tard. Deux versions des faits s’opposent alors. Le soldat, sur son lit de mort, accuse Eugénie d’avoir tenté de l’assassiner tandis que la jeune fille affirme qu’elle a voulu se suicider et que Delphin, voulant l’en empêcher, aurait involontairement retourné l’arme contre lui. L’accusation a choisi la sienne : Eugénie Bringard est inculpée de tentative d’assassinat.
Elle comparaît devant la cour d’assises de la Vienne les 4 et 5 août 1909. Les crimes passionnels ayant toujours une saveur particulière, le palais de justice de Poitiers est assailli par une foule de curieux dominée par « l’élément féminin », pour reprendre les termes du Journal de la Vienne. L’héroïne de ce drame apparaît dans son costume de deuil, le visage assombri par un chapeau noir. Au cours des débats, le public, les jurés et même les gendarmes ne peuvent contenir leurs larmes devant la tristesse de l’accusée. Alors que l’avocat général réclame une peine d’enfermement dans une maison de correction jusqu’à sa majorité, Eugénie est déclarée non coupable à l’unanimité.

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