jeudi 10 avril 2008

Le maquereau et la putain. Le drame du Palan

Après une carrière de souteneur de filles publiques à Paris, celui qui se fait appeler Benoît revient en septembre 1882 à Châteauroux, sa ville natale. L’homme de 23 ans semble vouloir se racheter une conduite. Il s’installe à Saint-Christophe et trouve un emploi de garçon boulanger. Le 17 février 1883, au cours d’un baptême, Benoît fait la connaissance de Juliette Renard. La jeune fille de 19 ans est bien connue dans la ville pour ses mœurs légères. Elle exerce la profession de fille de joie. Benoît tombe immédiatement sous son charme. Deux jours plus tard, il la demande en mariage. La cérémonie est fixée au 13 mars.

Juliette ne tarde pas à regretter l’impatience de sa décision. Au début du mois de mars, Benoît fait part de son désir de retourner vivre à Paris. Il souhaite emmener sa promise avec lui et reprendre l’activité qu’il exerçait auparavant. Juliette refusant de le suivre, Benoît se montre violent et se met à la frapper violemment. Cet avant-goût des « félicités conjugales » refroidit les ardeurs de la jeune fille qui rompt immédiatement sa promesse de mariage. Benoît tente par tous les moyens de se faire pardonner, mais chacune de ses tentatives se solde par un échec. La date du mariage approchant, Benoît devient comme fou. Le 10 mars, il achète un revolver chez un armurier de la ville. Il épie les moindres faits et gestes de Juliette. Il s’amuse avec elle, la mettant en joue et feintant d’appuyer sur la gâchette. Le 12 mars, Benoit propose à Juliette de passer la nuit avec elle. Cette fois, point de demande en mariage, juste un client qui s’offre les services d’une fille publique. Devant la jolie somme de 60 francs promise par le jeune homme, Juliette accepte. Ils se rendent dans un hôtel mal famé de la rue du Palan. Pendant que la jeune femme se déshabille, Benoît place discrètement son arme sous l’oreiller. Il attend le bon moment pour mettre son projet diabolique à exécution. Vers 22 heures, Benoît glisse sa main sous l’oreiller, s’empare du revolver et tire à bout portant sur sa maîtresse. Celle-ci grièvement blessée à la joue se précipite hors de la chambre. Benoît tire encore deux coups de feu dont un atteint sa victime à la tête. Couverte de sang, hystérique, Juliette parvient à se réfugier chez un voisin. Trois détonations résonnent de nouveau. Benoît s’est-il suicidé ? C’est du moins ce qu’il a tenté de faire croire. En réalité, il ne s’est fait que quelques égratignures à la cuisse. Le lendemain, au lieu de se rendre à l’église pour recevoir la bénédiction d’un prêtre, Benoit reçoit, dans sa cellule, la visite du juge d’instruction.

Le procès du drame du Palan s’ouvre à Châteauroux, le 13 juin 1883. « Quelle fange il a fallu remuer ! Quel écœurant spectacle nous ont donné les héros de cette honteuse affaire. Ce procès a mis à nu une des plaies les plus hideuses de notre époque », écrit le journaliste du Moniteur de l’Indre. Une foule nombreuse se masse très tôt devant le palais de justice. Chacun veut découvrir les habitants des bas-fonds de Châteauroux. Grâce à une plaidoirie éloquente, l’avocat de la défense, maître Mauduit, convainc les jurés d’accorder les circonstances atténuantes à son client. Celui-ci a gain de cause, Benoît est condamné à 5 ans de réclusion.

Sources : Le Moniteur de l'Indre
Illustration : La place du Palan (Archives départementales de l'Indre)

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