lundi 14 avril 2008

Mère et fille, complices d'un infanticide

Le 18 mars 1849, une découverte macabre est faite dans le village de Thuré. Le cadavre d’un nouveau-né gît dans la fontaine. Les soupçons se portent immédiatement sur Louise Ricatteau, dont le ventre arrondi n’était pas passé inaperçu auprès de plusieurs habitantes. La journalière de 24 ans finit par avouer son meurtre, forfait qu’elle a commis avec la complicité de sa mère, également dénommée Louise. Le 5 juin suivant, les deux femmes sont condamnées par le tribunal correctionnel de Châtellerault respectivement à trois et six mois de prison pour homicide par imprudence. Loin de s’être repenties, la mère et la fille poursuivent leur « association criminelle ». Elles sont de nouveau condamnées, en 1854, à six mois de prison pour vol de récoltes et maraudages. Leur peine est allongée à neuf mois d’emprisonnement s’en étant pris violemment aux témoins à la fin de l’audience.

C’est lors de leur détention à la prison de Châtellerault qu’un fait plus grave va se produire. Au moment de leur incarcération, en décembre 1854, Louise Ricatteau est de nouveau enceinte. A plusieurs reprises, elle essaie par tous les moyens de « faire couler » sa grossesse. En vain, le lundi 11 juin, Louise se tord de douleur. Elle est prise de contractions. Un docteur de Châtellerault, appelé en urgence, convient de l’imminence de l’accouchement. Il réclame au concierge de la maison d’arrêt, ainsi qu’aux autres détenues, la plus grande vigilance. Le lendemain matin, le concierge se rend aux nouvelles dans la cellule occupée par la mère et la fille Ricatteau. A sa grande surprise, les deux femmes sont absentes. Il les retrouve dans les latrines dans une position pour le moins fâcheuse : Louise est accroupie au-dessus de la fosse d’aisance, un couteau à la main, la robe couverte de sang et une botte de persil dans le corsage pour faire passer le lait. Sa mère, debout à ses côtés, semble dissimuler quelque chose auprès d’elle. Alerté une nouvelle fois, le médecin examine la fille Ricatteau et constate que l’accouchement a bien eu lieu. L’enfant nouveau-né est finalement retrouvé dans le trou des latrines et le placenta, près du mur où se tenait la mère. L’autopsie établira la viabilité du nouveau-né et démontrera la mort de celui-ci par asphyxie.Le procès des « Louise » pour infanticide et complicité s’ouvre à Poitiers le 19 août 1855. Pour sa défense, Louise déclare qu’elle voulait satisfaire un besoin et qu’elle n’a rien senti lors de la délivrance. Quant à sa mère, elle certifie ne s’être aperçue de rien. Dans cette sombre affaire, la fureur du jury s’est concentrée sur la jeune femme de 24 ans qui est condamnée à la peine de mort. Sa mère est acquittée. Graciée par l’Empereur, Louise est finalement incarcérée à perpétuité dans la prison austère pour femmes du château de Cadillac.

Sources : Archives départementales de la Vienne, 2 U 1627
Illustration : La château de Cadillac, prison pour femmes de 1820 à 1952


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