Dans la commune de Roiffé, Parfait Béchu, un carrier de 31 ans, connaît depuis quelques années, toute la gamme des déboires conjuguaux. En 1929, deux ans seulement après son mariage, sa femme demande le divorce. Parfait reconnaît, il est vrai, être parfois un peu trop "emportant". L'homme se console, malgré tout, assez rapidement. Un mois seulemet après la décision de justice, il rencontre Juliette Cirotteau, également en instance de divorce. La femme de 31 ans vient tout juste d'arriver dans la région. Le couple s'installe ensemble à Cursay. Le bonheur est de courte durée. début août 1933, Juliette annonce à Parfait qu'elle le quitte pour aller vivre avec René David. Cette décision est d'autant plus difficile à admettre que le nouvel amant est un ami proche de Parfait. Les deux hommes travaillent ensemble dans les carrières de Bellevue à "La Roche-Marteau". Inconsolable, ressassant inlassablement de sombres pensées, Parfait achète un revolver chez un armurier de Loudun. Est-il destiné à celle qui l'a quittée ou à "se faire sauter la cervelle", comme il l'a prétendu au cours du procès ?Le 11 août, Parfait rôde depuis l'aube devant la demeure de René David. Lorsque ce dernier part travailler, Parfait en profite pour s'approcher de la maison. Il espère convaincre une dernière fois Juliette de revenir avec lui. Celle-ci sort enfin, mais le rejette d'une façon méprisante. Parfait ne supporte pas ce nouvel affront. Il s'empare de son arme et abat froidement son ancienne maîtresse de six balles tirées en pleine poitrine. Conscient de l'acte terrible qu'il vient de commettre, l'accusé se réfugie dans un champ voisin. D'une main tremblante, il recharge son revolver, approche le canon de sa tempe et appuie sur la gâchette. La balle le blesse gravement sur le haut du crâne. Malgré cela, Parfait a encore la force de tituber jusqu'à la route nationale où il est finalement découvert. Sur lui, on retrouve une lettre destinée au curé de Roiffé, lui demandant d'être enterré à côté de celle qu'il aime et qu'il vient pourtant de tuer.
C'est les yeux grands ouverts - des yeux qui ne voient plus - que Parfait Béchu comparaît devant la cour d'assises de la Vienne le 14 novembre 1933. Ces deux billes opaques confèrent à l'accusé une physionomie étrange. L'autre attraction du procès est la déposition de l'amant, René David. La presse se montre extrêmement sévère sur cet individu qu'elle considère comme le responsable de ce drame. "Ce Don Juan de 43 ans n'a point les attributs extérieurs que l'on prête généralement aux séducteurs. D'une taille médiocre, les cheveux embroussaillés, la moustache hirsute, David tient difficilement la comparaison avec son rival, infiniment mieux que lui", écrit un journaliste. Grâce à l'habile plaidoirie de l'avocat de la défense, les jurés prononcent l'acquittement. Parfait écoute sans comprendre. Il faut que son défenseur lui explique qu'il est libre.
Sources : L'Avenir de la Vienne
Illustration : Le château de La Roche-Marteau, commune de Roiffé
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