samedi 28 juin 2008

Tuée sous les yeux de son fils pour une simple réprimande

En janvier 1923, les habitants du département de l’Indre sont sous le choc. Céline Nicodeau, résidant à la Maison Blanche à proximité de Châteauroux, a été assassinée en plein jour, sous les yeux de son fils de quatre ans. C’est son jeune domestique, Louis Métayer, qui a découvert dans la grange le corps sans vie de la malheureuse. A la fin de la Première Guerre mondiale, après s’être exilés en Suisse, Jules Nicodeau et sa femme, Céline Loulergue, viennent s’installer dans le département de l’Indre. Les jeunes mariés, âgés d’une trentaine d’années, deviennent propriétaires de l’hôtel du Cheval Gris situé rue Bourdillon à Châteauroux. A la naissance de leur premier enfant en 1919, ils cèdent leur commerce et achètent une ferme à la Maison Blanche, à 3 kilomètres de Châteauroux. Comme Jules est absent toute la semaine, il a repris momentanément l’activité de bouilleur de cru de son père décédé dans l’Allier, un domestique est engagé en juin 1922, pour aider à la traite des vaches et à la distribution du lait.

Il s’agit de Louis Métayer. L’enfant de 15 ans, pupille de l’Assistance publique, est né au Vivier, dans la commune du Pêchereau. Le mercredi 17 janvier 1923, vers 7h30, Louis Métayer place, comme à son habitude, dans son tombereau les pots de lait qu’il doit livrer en ville. Comme il rechigne un peu à la besogne, Mme Nicodeau lui fait de vifs reproches. « Tu fais mal ton travail. On devra se séparer de toi », dit-elle sèchement. Louis ne prête guère attention à ses remarques. Constatant ensuite que son domestique a dispersé du foin partout dans la grange, elle l’interpelle une nouvelle fois. « Il faut que je ramasse le foin que tu n’as pas pu lever proprement », ajoute-t-elle, exaspérée. Cette remarque est celle de trop. Louis pénètre discrètement dans la grange. Mme Nicodeau, occupée à rattraper la négligence de son employé, ne l’entend pas entrer. Le garçon s’empare d’un maillet et assène un coup violent sur la tête de sa patronne. Comme elle bouge encore, Louis s’acharne. Cette fois, le travail sera bien fait. Calmement, Louis ferme la porte derrière lui, en profite pour voler la montre et les chaussures de son patron, et part faire sa tournée comme si de rien n’était. De retour vers 10h, il trouve le petit Nicodeau en pleurs devant la maison. Louis prend l’orphelin par la main et se rend à Châteauroux, chez la belle-sœur de Jules Nicodeau. Sans aucun signe d’affolement, il lui annonce que sa patronne a été tuée. C’est finalement le fils Nicodeau qui met les gendarmes sur la voie. « C’est P’tit Louis qui a enfermé maman dans la grange », dit l’enfant, encore sous le coup de la terreur. Longuement interrogé, Louis Métayer finit par avouer son meurtre avec une impassibilité effroyable.

C’est avec ce calme qu’il devait avoir en frappant sa patronne que Louis Métayer vient rendre compte le 18 avril 1923, devant le tribunal correctionnel de Châteauroux, de son monstrueux forfait. Comme le prévoit la loi pour les procès intéressant les mineurs pénaux de moins de 18 ans, les débats se déroulent à huis-clos. Louis Métayer est accusé de meurtre et de vol. Il est condamné à la peine maximale délivrée à un mineur, vingt ans de réclusion dans une colonie correctionnelle et dix ans d’interdiction de séjour. « L’œil sec, le regard obstinément fixé à terre, Louis Métayer s’en est allé, insensible à ce qu’il venait d’entendre, pensant peut-être à l’heure de la libération qui le rendra à la société à 35 ans, probablement avec ses mêmes instincts et encore jeune », conclut le chroniqueur du Journal du département de l’Indre.

Sources : Le Journal du département de l'Indre
Illustration : Numéro de l’
Assiette au Beurre de 1908 sur la délinquance juvénile (illustration du dessinateur castelroussin Bernard Naudin)

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